Aux origines de l’humour, le théâtre grec
Le mot comédie nous vient ainsi du grec « kômôidía », qui est formé de « komos » qui veut dire fête et « oide » chant. C’est un genre théâtral dont le but était de faire rire mais aussi dénoncer les travers humains.
La comédie européenne est née en Grèce, dans le cadre des fêtes traditionnelles en l’honneur de Dionysos. Au milieu des réjouissances populaires qui suivaient les cérémonies religieuses, un cortège burlesque se formait dans une explosion de plaisanteries et de chansons: ce théâtre quasi spontané engendra dès le VIe siècle avant J.-C., dans les pays doriens, puis à Mégare et en Sicile, des représentations plus concertées, farces, pantomimes ou divertissements mythologiques. Mais ce ne fut guère avant 460 que l’on admit la comédie aux représentations officielles qui avaient cours en Attique: considérée dès son apparition comme un genre mineur, la comédie grecque porta longtemps les traces de son origine populaire.
Dans une première phase, qui va environ de 450 à la fin du Ve siècle, la « comédie ancienne » est illustrée surtout par Aristophane; fantaisiste jusqu’au mépris de toute vraisemblance, mariant la bouffonnerie et la poésie, elle n’en mord pas moins directement sur le réel: elle met en scène les petites gens de l’Attique aux prises avec l’actualité la plus immédiate, pour s’en prendre avec virulence aux personnages en place, aux mœurs politiques, voire aux fondements de la cité. Sa marque principale est la liberté de l’imagination, du langage, du geste et de la pensée. Mais, à la fin du Ve siècle, les auteurs comiques sont amenés à renoncer à toute satire trop actuelle et trop précise: la « comédie moyenne », qui dure jusque vers 330, cherche ses thèmes dans la mythologie et dans l’observation des mœurs, en attendant que Ménandre, principal auteur de la « comédie nouvelle » (330-250), oriente cet art vers la peinture de l’amour contrarié, des caractères et des conditions, en évitant toutes les outrances du langage; l’intrigue s’émonde, elle aussi, et la psychologie s’affine pour exprimer les grandes lignes d’une morale positive. On voit le chemin parcouru: du comique au plaisant, du merveilleux et du bouffon au naturel, de la satire débridée à la leçon morale, de la fête populaire au divertissement de bonne compagnie.
La comédie durant le Moyen Âge en Europe
Après l’effondrement de la culture antique, le Moyen Âge, qui ignore le mot « comédie », réinvente de nombreuses formes de théâtre comique. Le théâtre se joue dans la rue (théâtre de rue), sous la forme de mystères, fabliaux, farces, soties ou encore mime.
Certains de ces genres sont plus ou moins inspirés de survivances de genres antiques comme l’atellane.
En effet, la tradition des jongleurs et le goût du divertissement parodique chez les clercs s’expriment au Moyen Âge dans une grande diversité de pièces de caractère satirique et didactique:
- les diableries, qui sont incluses dans les mystères religieux
- les farces, qui sont des pièces courtes mettant en scène des types populaires de la vie quotidienne (le paysan, la femme, le curé, le noble, etc.) et une situation simple sur fond de morale traditionnelle
- les soties (qui apparaissent aux XVe et XVIe siècles), axées sur le « sot » (une sorte de clown avant la lettre) et qui usent de toutes les libertés de la satire.
Dès le XIIe siècle, la bourgeoisie (habitants du bourg), a sa propre littérature, véritable satire sociale avant la lettre. Elle est par essence malicieuse, pittoresque, mais le plus souvent réaliste. Il nous en reste essentiellement des fabliaux (Estula, Le Lévrier et le Serpent, Les Trois Aveugles de Compiègne), le Roman de Renart, et, plus tard, des farces (La Farce de Maître Pathelin, XVe siècle).
Au XIIIe siècle, le théâtre se joue sur la place du village ou de la ville. Les spectateurs sont des « bourgeois » (habitants du bourg), tandis que les cours des seigneurs préfèrent les spectacles de tournois, de ballets, etc.
Au cours des XIVe et XVe siècles, les spectacles deviennent payants. De ce fait, le théâtre se joue de plus en plus souvent dans des lieux clos et non plus sur la grand-place. Peu de décors sont utilisés au Moyen Âge: on se contente parfois d’écriteaux signalant les lieux. Mais les machineries se développent, afin de créer des « effets spéciaux ».
Toujours au Moyen Âge, les bouffons ont pour rôle de faire rire les gens: ils divertissent, utilisent l’insolence et sont parfois conseillers; les plus connus sont les fous de rois et des seigneurs.
La comédie en France sous l’Humanisme
Au XVe siècle, Rabelais, écrit Gargantua devenant le premier auteur à avoir utilisé le burlesque dans ses œuvres. Ses œuvres majeures, comme Pantagruel (1532) et Gargantua (1534), qui tiennent à la fois de la chronique, du conte avec leurs personnages de géants, de la parodie héroï-comique, de l’épopée et du roman de chevalerie, mais qui préfigurent aussi le roman réaliste, satirique et philosophique, sont considérées comme une des premières formes du roman moderne.
Dans les années 1456-1460 sort l’une des rares pièces de comédie de l’époque La Farce de Maître Pathelin. Toujours au xve siècle apparaît la Moralité, mettant en scène des personnages allégoriques, représentant les vices et vertus des hommes ainsi que les défauts de la société
Au XVIe siècle, des lettrés créent la comédie humaniste, afin de s’opposer à la tradition médiévale de la farce et de retourner aux sources de la comédie latine. Les comédies humanistes constituent les premières « comédies régulières » de l’histoire du théâtre français. Il faut entendre par cette appellation les comédies composées à l’imitation de la comédie romaine et qui en respectent les règles formelles, par opposition aux farces, sotties, moralités et autres jeux théâtraux de l’époque désignés par le même terme de « comédie », qui regroupait dans le vocabulaire courant tous les spectacles à dénouement heureux (et qui seront tous interdits sous cette appellation par édit du Parlement de Paris de 1588 à 1594).
La comédie en Europe sous la Renaissance
Sous la Renaissance, les auteurs de toute l’Europe veulent retourner aux sources du théâtre et s’approprier la comédie latine. On appelle comédie « régulière » la comédie qui s’inspire de la comédie latine, et qui en respecte les règles formelles, tout en s’opposant aux diverses formes de comédies médiévales.
La comédie italienne
La comédie italienne, au XVIe siècle, voit apparaître la commedia dell’arte qui supplante la comédie régulière; son influence sera considérable sur l’évolution des techniques théâtrales.
La comédie shakespearienne et élisabéthaine
En Angleterre à la fin du XVIe siècle, la comédie élisabéthaine, nourrie d’observations, est dominée par William Shakespeare, mais elle vaut aussi des succès à Ben Jonson, Francis Beaumont et John Fletcher, Thomas Middleton, Thomas Dekker.
La comédie élisabéthaine avait un sens très différent de la comédie moderne. Une comédie de Shakespeare est celle qui a une fin heureuse, impliquant généralement les mariages entre les personnages non mariés, et un ton et un style qui est plus léger que les autres pièces de Shakespeare.
La comédie romanesque
Les Fables de La Fontaine continuent une tradition médiévale française, d’historiettes comiques et de satire des mœurs sociale, dont les acteurs sont des personnifications d’animaux, comme le Roman de Renart où on trouve l’anecdote du « Corbeau et du renard » avec des morales mises en adages, ou comme Marie de France chez laquelle on trouve la première version du « Loup et de l’agneau ».
La Fontaine a aussi fait un travail de traduction et d’adaptation de textes antiques, comme les Fables d’Ésope (par exemple « La Cigale et la Fourmi »), de Phèdre, d’Abstémius, mais aussi de textes d’Horace, de Tite-Live (« les Membres et l’estomac »), de lettres apocryphes d’Hippocrate (« Démocrite et les Abdéritains »), et de bien d’autres encore, elles constituent une somme de la culture classique latine et grecque, et s’ouvrent même dans le second recueil à la tradition indienne.
18ème siècle
Au XVIIIe siècle en France apparaît le théâtre d’auteur, comme celui de Marivaux et de Beaumarchais. En ce siècle des Lumières, les « unités », reconnues comme essentielles au XVIIe siècle car elles permettaient (selon Boileau, entre autres) de donner plus de vraisemblance aux pièces, apparaissent peu à peu comme des carcans dont les auteurs cherchent à se défaire. De plus, les philosophes des Lumières prennent violemment parti contre le clergé et son attitude autoritaire envers le théâtre. Les « esprits libres » estiment que le théâtre est non seulement un divertissement innocent, mais aussi un moyen pédagogique: Voltaire et Diderot soutiennent l’idée selon laquelle la représentation des vices et des vertus peut « éclairer » les hommes. Ce siècle des Lumières voit apparaître la satire (Alain René Lesage en France, Sheridan en Angleterre) et l’analyse des sentiments (Marivaux).
Le théâtre de la foire (regroupant la comédie improvisée, et la farce), héritée du théâtre italien et de la Commedia dell’arte, se transforme en opéra-comique (qui elle-même hérite aussi de la Comédie-ballet).
19ème siècle
Au début du XIXe siècle, le mime et pantomime, et la marionnette (Guignol), venant du théâtre de la foire, sont recréés et ont acquis leur forme actuelle. Sous le Second Empire, le théâtre de la foire fait une dernière transformation en vaudeville dans le théâtre de boulevard (dans lequel il y aura un hommage dans le film Les Enfants du paradis). Face à ces répertoires non littéraires du théâtre comique, la Comédie-Française, encore toute jeune, parvient à imposer le respect des normes de la dramaturgie, ce qui fait qu’elle devient symboliquement une importante institution, garante des traditions.
Nouvelles formes de comédie
Au XXe siècle, la comédie se diversifie dans la musique (comédie musicale), dans le cinéma (cinéma comique), dans la télévision, et dans de nouvelles formes théâtrales (sketch, stand-up et nouvelles formes d’improvisation).